Finnemark, aux portes du grand Nord 3/4

Finnemark.

Les jardins se font plus naturels. L’ordre militaire des villages se voit peu à peu effacer. Les pelouses perdent de leur rigueur, les peintures de maison de bois paraissent moins fraîche, des objets trainent autour des maisons. La vie reprend. Au bord des garages où s’entassent des tonnes d’objets, des quads, des motoneiges et cie laisse imaginer un hiver qui redessine complètement le paysage. Les troupeaux de rennes viennent ajouter une note polaire à cette nouvelle partie du voyage. Animaux majestueux aux grands bois trônant fièrement sur leur minuscule tête. Dans la brume, on distingue d’immenses montagnes, encore habillées de leurs collerettes de neige. C’est beau. On s’était dit qu’on s’arrêterait, mais le paysage envoûtant du grand nord ne cesse de nous pousser toujours plus haut.

Steppes interminables.

Toute la route, j’ai cherché une image de ce bout du monde, jamais je n’aurais pu rêver plus grandiose. La définition même du terme grands espaces se dessine sous mes yeux. Une seule et unique route, droite, interminablement incroyable. Parfois un amas de maisonnettes de bois rouge-usé s’éparpillent au pied d’une colline. Des troupeaux de rennes déambulent nonchalamment au milieu de ce décors vierge. On a ici la sensation qu’aucun être humain n’a jamais foulé ce sol, que l’homme se contente de traverser ce panorama sur le tapis lisse d’asphalte qui serpente entre plaines et montagnes. La vie sauvage semble être la seule maîtresse de ces lieux presque mystique.

Plateau du finnemark, 2 jours de marche.

Étendues incommensurables. Jamais le terme « à perte de vue » n’aura eu autant de sens. Balayée inlassablement par les vents, la végétation rase le sol, courbée sous le pouvoir des éléments. Le temps semble s’arrêter. La plate monotonie du paysage laisse à ton esprit tout le confort de divaguer à l’infini, ton corps avançant mécaniquement au milieu de la steppe. Une incroyable palette de couleurs ocres habillent cette lande vierge et hors du temps effréné du monde. Comme propulsé au pied de la genèse du monde, là où l’homme n’aurait encore jamais posé le pied.

La nuit.

Retrouver le plaisir de la nuit. Le soleil ne nous impose plus sont rythme effréné, il n’est plus aussi vaillant qu’il y a quelques jours. La lumière au loin des maisons dans la nuit sombre, celle des bougies dans notre petite chambre douillette, une ambiance douce, propice au sommeil. Terminé les décalages horaires imaginaire, les réveils la nuit à se demander si il est 2h ou bien 10h. La pluie tombe sur le toit, douce et fine. Les lueurs orangées de électricité ont remplacées l’infatigable lumière du géant de feu. Cette atmosphère me fait du bien. La lune reprends enfin sa place dans le ciel, les étoiles aussi, les oiseaux sont enfin couchés, la vie a repris un rythme plus habituel pour mon esprit.

Le retour.

Il a ce matin où tu te réveilles, et soudainement le voyage sent la fin. Hier encore tu étais dedans, happée par tes besoins primaires. Et puis aujourd’hui, tout est terminé. Il faut rentrer. L’itinérance et l’errance te renvoie en bas de l’échelle sociale. Une boule de colère qui monte lentement, il va falloir y retourner. C’est comme une punition que l’on t’impose, on ne l’a pas voulu nous l’aire du consumérisme et de l’industrialisation, alors pourquoi est on obligé de les servir. Pourquoi ne pourrais t-on pas vivre éternellement sur les routes comme maintenant, sans avoir ce sentiment constant d’être fautif ? 
 
Il faut avaler les kilomètres, boulimiquement. Les journées sont longues, les paysages fades. Triste retour à la civilisation, loin des grands lacs aux eaux limpides qui nous accueillaient le soir venu. Les vastes étendues de lichen ont laissés place au goudrons et aux autoroutes. Ils nous faut remplir nos réserves d’eau dans les toilettes publiques ou les stations essence, contraint de nous cachés, de nous faire les plus discret possible lorsque le moteur se coupe enfin. De nouveau, nous ne sommes plus les bienvenus, l’homme à repris sa place envahissante de maître dans le paysage. 

La ville.

Retour à la civilisation. Épuisant défilé humain, appel constant à la consommation. L’impression de faire tache dans cette masse bien sapée. Frustration financière constante, une perte de repère après 2 mois seul. Trop de sollicitations visuelles, comme un indien en ville, piétiner le béton fatigue 10 fois plus qu’un dénivelé norvégien.
 
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