GR2 Traversée de la Réunion 1/2

GR2, Réunion. 180km de traversée en autonomie sur l’île Bourbon.

Traversée de la Réunion

Mon corps s’habitue au confort rudimentaire de la tente. Les nuits sont de moins en moins hachurées, et les réveils sont chaque jour plus grandioses. Pas après pas nous plongeons un peu plus dans les profondeurs de l’île, nous éloignant progressivement de la réalité. Désintoxication du corps et de l’esprit. 
 
Je comprend enfin cet éloge tant chanté de la marche. Méditation en mouvement. Bercée par la mélodie naturelle du chant des oiseaux, le regard absorbé par l’étonnante richesse végétale. Se gaver visuellement de tant de belles choses occupe suffisamment l’esprit pour ne plus divaguer.
Il faut réapprendre la patience, la privation et la simplicité. Se contenter de ce qu’on nous offre, sans en vouloir plus. Une fois l’effort physique apprivoisé, il faut encore négocier avec les exigences de son intestin, trop habitué à avoir tout ce qu’il désire tout de suite. 
Avancer à pied réconforte avec son corps. Il est extraordinaire de voir le trajet que l’on peut parcourir simplement en marchant. Cheminer lentement pour mieux s’approprier les lieux, pour les mériter et les apprécier. Une journée de marche fera de n’importe quel coin de terre un magnifique bivouac car, quand on commence un voyage à pied, on a plus envie de s’enfermer dans une chambre d’hôtel, on y serait trop à l’étroit dans ses beaux draps.

Partir si loin pour rencontrer ses voisins. À la réunion, j’aurai appris à connaître ma génération. Jeunes métropolitains trentenaires, au besoin de grand air. Nous sommes huit à faire cette traversée au même moment. Nos vies n’ont chacune rien à voir avec celle de l’autre. Nos façons de voyager, de consommer, de vivre diffèrent du tout au rien. Tribu hétéroclite pourtant si proche lorsqu’il s’agit de mettre un pied devant l’autre. Chacun de nous reflète la diversité mais aussi les convictions communes d’une génération aux milles questions. Apprendre de l’autre, de celui que tu croises tous les jours près de chez toi mais que les barrières sociales t’empêchent souvent d’approcher. Le voyage est une petite île de bienveillance, où la classe sociale de chacun disparaît sous la simplicité de l’ailleurs. Dépouillés de nos attributs, l’apriori si néfaste laisse place à la douceur de vivre brut. Le partage ponctué de rire dans un doux cocon de gentillesse constante. C’est peut-être juste cela que l’on cherche en partant.

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