Sous le marché couvert, dans le brouhaha et la fumée, j’aperçois ces groupes de femmes des villages de montagne. De longs foulards fleuris dans les cheveux, des robes colorées et pailletées, le visage mat du soleil des hauteurs. Je les trouve magnifiques.
Là, à même le sol, deux d’entre elles retiennent mon attention. Des bouquets de roses frais les entourent, les couleurs de leurs habits et de leurs visages dansent avec celles de fleurs qui jonchent le sol. Ces deux vieilles femmes sont installées au pied d’une fontaine, la lumière du soleil de midi traverse les bâches bleues qui couvrent le marché. Les couleurs sont superbes.
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Carlos redescend ma joie d’un cran.
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Ce n’est pas un zoo tu ne peux pas les prendre en photo comme ça, demande leurs avant. Évidemment ma timide demande se voit répondre d’un stricte non de la tête. Je suis vexée, déçu. Ce pays est tellement photogénique, mais impossible de le photographier. Chaque jour je vois un superbe cliché de ces hommes aux grands chapeaux adossés aux murs colorés, de ces femmes aux longs cheveux noirs et aux yeux foncés, d’enfants jouant dans les rues. Je n’aime pas voler les clichés. Je n’aime pas passer pour une touriste irrespectueuse. Mais lorsque je demande la permission la photo perd de son charme, la scène se rompt…
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En dégainant ton appareil photo tu affiches ton rang social, ton argent à ces gens qui, pour la plupart, ne gagne pas plus de quelques centaines d’euros par mois. Alors les photographier te devient écœurant et déplacé, toi et ton argent qui coule si facilement. Photographier pourquoi finalement ? Exposer le dilapidement de tes gros euros au pays de l’injustice sociale. Le Mexique se remplit avidement les poches, laissant quelques minuscules miettes à ses travailleurs.
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Article du
17 octobre 2016